Etudes vaccinales Covid-19

A la mi-décembre 2020, deux articles ont été publiés dans la presse scientifique internationale à propos de vaccins contre la Covid-19. Je livre ici mon analyse personnelle de ces deux articles.

L’article concernant le vaccin BNT162b2 (vaccin à ARN messager de Pfizer) a été publié le 10 décembre dans le New England Journal of Medicine. L’étude, conduite aux Etats-Unis, en Amérique du Sud, en Afrique du Sud et en Europe, a comparé ce vaccin (2 doses à 3 semaines d’intervalle) à un placebo, elle a inclus près de 43 000 sujets de plus de 16 ans, en bonne santé ou avec des maladies chroniques stables.

L’efficacité préventive à court terme du vaccin est de 95% après injection des 2 doses, elle est proche de 50% après une seule dose. La durée de maintien de la protection n’est pas connue. La tolérance à court terme est médiocre pour chacune des 2 injections, avec des effets indésirables significativement plus fréquents que sous placebo de type : fièvre, fatigue, maux de tête, frissons, douleurs musculaires ou douleurs articulaires ; 40% des sujets ayant reçu le vaccin ont dû prendre des médicaments contre la fièvre. La tolérance à moyen et à long terme n’est pas déterminée en l’absence de données : le recul médian est de 2 mois.

L’article est relativement explicite même si certains points ne semblent pas très clairs (efficacité chez les adolescents, nombre exact de sujets analysés sur la tolérance, pourquoi seulement 87% des sujets injectés ont eu un suivi médian de 2 mois ?). Il reste cependant très convaincant sur le volet efficacité, notamment du fait que l’évaluation a porté aussi sur des sujets à risques (sujets âgés ou atteints de comorbidités).

L’article concernant le vaccin ChAdOx1 (vaccin à vecteur adénoviral contenant une séquence d’antigène de surface, issu de la collaboration entre l’université d’Oxford et AstraZeneca) a été publié le 8 décembre dans le Lancet. Il rapporte une analyse conjointe (« poolée ») de quatre études distinctes conduites en Grande-Bretagne (2), au Brésil et en Afrique du Sud. Ces 4 études n’ont pas exactement le même schéma, pas les mêmes critères d’inclusion, des bras contrôles différents, des critères d’évaluation différents. Elles ont inclus près de 23 000 sujets, essentiellement en bonne santé et âgés de 18 à 55 ou 65 ans.

L’efficacité préventive est difficile à évaluer : le schéma d’administration a été modifié en cours d’études, des sujets ont reçu une seule dose de vaccin, d’autres deux doses successives identiques, d’autres encore une dose faible suivie d’une dose forte ; le délai entre les 2 doses a été variable (de 4 à 12 semaines). L’article présente des résultats sur des sous-groupes, nécessairement constitués a posteriori : chez les sujets ayant reçu 2 doses identiques, l’efficacité préventive est de 62% et chez les sujets ayant reçu une faible dose puis une forte dose, elle est de 90%. La durée de maintien de la protection n’est pas connue. Les données de tolérance ne sont pas détaillées dans l’article (ni à court terme, ni à moyen ou long terme).

Cet article ne permet absolument pas de conclure sur l’efficacité ni sur la tolérance de ce vaccin : l’analyse conjointe d’études distinctes de méthodologie aussi différentes et aussi changeantes au cours du temps, même approuvée par l’agence de santé britannique, est simplement rédhibitoire. De surcroit, ce vaccin n’a pas été évalué (car pas administré) à des sujets à risques (sujets de plus de 55 ou 65 ans, sujets malades).

16/12/2020

Mots-clés : Lecture, Vaccin, SARS-CoV-2, Covid-19, BNT162b2, ChAdOx1

 

Mise à jour le 06/01/2021

L’article concernant le vaccin mRNA-1273 (vaccin à ARN messager de Moderna) a été publié le 30 décembre dans le New England Journal of Medicine. L’étude, conduite aux Etats-Unis, a comparé ce vaccin (2 doses à 28 jours d’intervalle) à un placebo, elle a inclus près de 30 000 sujets de plus de 18 ans, en bonne santé ou avec des maladies stables.

L’efficacité préventive à court terme du vaccin est de 94% après injection des 2 doses. La durée de maintien de la protection n’est pas connue. La tolérance à court terme est médiocre, avec des effets indésirables significativement plus fréquents que sous placebo de type : fièvre, fatigue, maux de tête, frissons, douleurs musculaires ou douleurs articulaires, essentiellement pour la seconde dose, la première dose semblant mieux tolérée que la seconde. La tolérance à moyen et à long terme n’est pas déterminée en l’absence de données : le recul médian est de 2 mois.

L’article est explicite et très convaincant sur le volet efficacité, notamment du fait que l’évaluation a porté aussi sur des sujets à risques (sujets âgés ou atteints de comorbidités).

 

Mot-clé additionnel  mRNA-1273

 

Mise à jour le 02/02/2021

L’article concernant le vaccin Gam-Covid (association séquentielle de deux vaccins à vecteur adénoviral contenant une séquence d’antigène de surface, issu de la collaboration entre des universités et des hôpitaux de Moscou, dit : vaccin Sputnik-V) a été publié le 2 février 2021 dans le Lancet. L’étude, conduite à Moscou, a comparé ce système vaccinal (2 vaccins proches mais différents, administrés à 21 jours d’intervalle) à un placebo, elle a inclus près de 22 000 sujets de plus de 18 ans, essentiellement en bonne santé (de nombreuses causes d’exclusion sont mentionnées : donneurs de sang, sujets infectés par d’autres virus, sujets alcooliques chroniques, etc.).

Cette étude pose des questions éthiques. En effet, elle a été conduite de septembre à novembre 2020, soit après l’autorisation provisoire de ce système vaccinal en Russie en aout 2020 ; des sujets à haut risque ont ainsi été inclus dans cette étude et certains y ont reçu un placebo alors qu’ils auraient pu (dû) recevoir un vaccin véritable en dehors de cette étude.

L’efficacité préventive est difficile à évaluer du fait d’une méthodologie surprenante. En effet, le critère d’évaluation principal n’est ni clinique ni virologique mais une combinaison des deux, c’est la proportion de sujets ayant un test PCR positif au 21ème jour, sauf si les sujets sont asymptomatiques. Par ailleurs, cette évaluation survient juste avant l’injection du 2ème vaccin, l’étude n’évalue donc que le 1er composant (rAd26) du système. Les auteurs annoncent sur cette base une efficacité préventive de 92%. Cependant, les sujets ayant développé un Covid clinique avant le 21ème jour ont été exclus de l’analyse d’efficacité, ce qui ramène en fait l’efficacité préventive à 73%. Cette étude a en outre inclus presque uniquement (98,5%) des sujets blancs, très majoritairement des hommes (plus de 61%), l’extrapolation des résultats à d’autres populations n’est pas assurée.

L’article présente aussi des résultats sur le sous-groupe des sujets de plus de 60 ans, sans que soit précisé clairement si cette analyse était prévue à l’origine ou si elle a été décidée a posteriori : l’efficacité préventive sur ces sujets est semblable à ceux des sujets plus jeunes. Il n’est cependant pas précisé combien de patients très âgés ont été inclus, les auteurs ne donnent pas l’âge médian de cette strate mais seulement l’âge moyen (65,7 ans), qui est très sensible aux valeurs extrêmes.

La durée de maintien de la protection n’est pas connue.

Les données de tolérance ne sont pas détaillées dans l’article (la durée médiane de suivi est de 48 jours), les auteurs indiquent que tous les résultats ne sont pas encore analysés et qu’ils feront l’objet d’une publication ultérieure.

Cet article ne permet absolument pas de conclure sur l’efficacité ni sur la tolérance de ce système vaccinal : la publication de résultats d’efficacité avec plus de recul et sur des populations-cibles (sujets âgés, malades) est nécessaire ainsi que celle des données de tolérance.

 

Mot-clé additionel : Gam-Covid-Vac

Date de dernière mise à jour : 08/02/2021